Après notre découverte des temples de Bagan, nous les quittons pour rejoindre Mindat, une petite ville dans l’Etat de Chin, situé à l’Ouest du pays.
Nous sommes alors le 9 avril soit tout proches du début de la fête de l’eau dans le pays. Cette fête dont nous aurons l’occasion de reparler dure une semaine, on nous informe que nous ne trouverons aucun transport à cette période. La personne qui nous vend nos tickets de bus nous conseille donc d’éviter de partir pour Mindat car nous allons y rester pour au moins 8 jours (les bus étant souvent overbooké à la fin de la fête), et qu’il n’y a rien à faire là bas (même pas de Wifi). Il nous suggère plutôt d’aller à Mandalay pour profiter de l’ambiance de la fête.
Nous étions donc prévenus, cependant Marion, la cousine de Lise qui a passé 1 an en Birmanie, nous avait dit qu’elle avait beaucoup aimé cette région et on avait bien envie de l’écouter et de sortir un peu des sentiers battus pour aller dans une région ouverte aux tourisme depuis seulement 3 ans. Et puis l’idée de passer la semaine entière à Mandalay ne nous enchantait pas, et nous espérions tout de même trouver un moyen de transport.
Bref nous voilà partis pour l’Etat de Chin devant les yeux ahuris du monsieur du bus !
Arrivés à Mindat nous nous posons dans une petite guesthouse, ici on est loin des zones touristiques et du confort aussi. Notre idée était de faire un trek pour partir découvrir des villages reculés dans les alentours.
Notre hotel nous présente donc un guide qui, mis à part le prix, n’a su répondre à aucune de nos questions :
« Du coup vous êtes guide de trek ? – Oui.
– Et ça dure combien de temps ? – Comme vous voulez.
– On va ou ? – Dans des villages, mais je ne sais pas vous montrer ou sur la carte.
– On va faire quoi ? – Marcher
– Oui ca on avait compris ! Mais combien de temps ? Ca sera quoi la journée type ? On va dormir ou ? On porte nos repas ? .. … »
La seule indication est que l’on n’allait pas manger la nourriture locale car nous serions malades ; il y a une autre personne qui sera là pour l’aider à faire à manger et transporter le tout sur son scooter.
On est donc parti avec lui, ne sachant pas vraiment à quoi nous attendre, mais nous disant que ce serait surement bien ! Au final nous avons été très agréablement surpris.
A peine partis, il s’arrêtait dans les magasins acheter des gâteaux et des boissons de leur région qu’il voulait nous faire découvrir. On a aussi visité un « musée » avec une personne nous expliquant un peu leurs coutumes et leurs traditions.
On apprend que le peuple Chin était animiste auparavant, et se livrait donc à des sacrifices d'animaux. En gros quand une famille a assez d’argent elle achète un animal qui va être sacrifié, souvent des boeufs. Tout un cérémonial y est associé, et les cendres des animaux sont mis sur le tombeau familial pour que leurs esprits protègent les membres de la famille, le crane de la bête est quand à lui affiché fièrement sur la maison de la famille. On peut donc se faire une idée de la richesse des familles en fonction du nombre de trophées, ceux ci datant parfois de bien des générations en arrière.
Aujourd'hui la quasi totalité des gens sont chrétiens, mais ils continuent à pratiquer des sacrifices, par esprit de tradition mais aussi comme moyen de faire une grande fête. On trouve donc de manière amusante des poteaux traditionnels de sacrifice juste devant une croix.
Pendant ces 3 jours nous n’avons pas vu de sacrifices, et toute la cérémonie qui va avec ; en effet nous sommes arrivés trop tard la bête était déjà morte et dépecée. (L’odeur par contre n’avait pas totalement disparue) !
Dès notre première pause repas, au vu de la quantité de nourriture et de boissons que notre guide nous a préparé nous comprenons que nous n’aurons pas besoin de tous les paquets de gâteaux qui sont dans notre sac ; on ne va pas mourir de faim et ce qu’il nous a préparé est bien meilleur qu’un grand nombre de restaurant dans lesquels nous avons mangé jusqu’à présent.
Avec la chaleur on apprécie surtout grandement les salades de tomates et d’avocats !!
Notre marche se fait sur des petits chemins traversant des collines et des rivières sur des vieux ponts. Nous traversons aussi plusieurs petits villages, et découvrons des habitants du peuple Chin. Dans cette ethnie, les femmes avaient pour habitude de se faire tatouer sur le visage des motifs suivant leur tribu. En effet, toutes les femmes d'un certain age que nous croisons portent ces tatouages impressionants, ce qui n'est pas le cas des plus jeunes cette pratique ayant été interdite.
Pour notre première nuit nous ne savions pas vraiment à quoi nous attendre et en arrivant dans un village (3 maisons et une église) le guide nous explique qu’il est né et a vécu 13 ans dans ce village et que nous allons dormir içi chez le pasteur et ses 9 enfants.
On n’est pas sûr d’avoir vu 9 enfants, on ne les a jamais vu tous en même temps et on a un peu perdu le compte mais on confirme : il y avait beaucoup d’enfants, mais c'est d'ailleurs le cas dans tous les villages traversés, des enfants en train de jouer partout, notre guide nous explique que les familles ont souvent plus de 6 enfants.
Nous avons été un peu déçu d'avoir assez peu d'échanges avec la famille qui nous accueille : ils ne parlent pas anglais, et semblent plutôt intimidés par nous. Nous dinons aussi dans notre coin le repas préparé par le guide.
Notre lit pour la nuit, est constitué d'une couverture sur une natte tréssée posée à même le sol, mais nous nous sentons privilégié car la famille nous a laissé la pièce principale de la petite maison et nous avons donc un peu d'intimité tandis qu'ils se répartissent dans la cuisine et une autre minuscule pièce.
Nous avons eu un peu peur à la tombée de la nuit en voyant le nombre impressionnant de cafard se balader dans la pièce mais finalement ils sont allés se coucher donc nous avons pu faire de même à notre tour.
Le lendemain lorsque nous partons il fait déjà chaud, heureusement que l’on croise des rivières assez régulièrement qui nous permettent de faire des pauses baignades, et d’observer les enfants s'amuser dans l'eau et laver leur linge.
Notre marche nous emmène à traverser plusieurs petits villages, dans lesquels nous croisons les habitants sur le pas de leurs maisons. Celles ci sont faites en bois ou en bambou tressé et placées sur pilotis afin d'être à plats dans cette région où rien n'est jamais plat. Les pilotis permettent aussi de se mettre à l'abri de l'humidité lors de la période de la mousson.
Dans l'un de ces villages un monsieur organisait une grande fête, et nous a invité à passer la journée avec eux, (il devait y avoir une cinquantaine d’adultes et au moins autant d’enfants) car sa fille qui vit avec son mari dans le village de son mari est venue leur présenter leur nouveau né (qui avait alors 15 jours), en apportant pour fêter ca un boeuf, 3 porcs, et des poulets.
Nous sommes arrivés à temps pour la prière (on n’est pas habitué aux prière Baptiste donc ca a été particulier) puis pour le repas… enfin le premier repas on devrait dire.
En effet on nous explique que, si nous mangeons tout d'abord du boeuf séché, 3 porcs ont été tués ce matin et sont maintenant en train de cuire - ils seront pour le second repas – puis ce sera au tour du bœuf d'y passer, qui sera pour le 3ème repas et enfin les poulets constitueront le 4ème repas. Le tout en une après midi !
Les gens se relaient donc autour d'énormes paniers de riz et de plats de viande qu'ils mangent à même le plat, puis sortent dehors pour que d'autres puissent prendre leur place.
Avec chaque plat une nouvelle boisson est servie, nous n’avons aucune idée des ingrédients par contre. La seule chose que l’on peut dire c’est que c’était toujours très sucré et sans alcool !
Et puis il y avait des interludes : à commencer par la mise à mort du bœuf. Celui ci était attaché à un arbre, et il a été tué par plusieurs coups de fusils (avec des fusils artisanaux traditionnels, d’ailleurs l’un d'eux fusils n’a pas fonctionné) mais aussi 2 flèches tirés à l'arc à bout portant. Tout cela a pris un certain temps, les armes et les chasseurs changeant, et n'était donc pas super pour l'animal qui souffrait et se débattait. Une fois mort, celui ci sera dépecé et une partie mise à sécher tandis que le reste est cuisiné immédiatement.
Ensuite a eu lieu la « cérémonie des couteaux ». Dans ce peuple, chaque homme possède un couteau qu'il porte dans un étui avec un petit panier. Et donc aujourd'hui, le chef du village, accompagné de quelqu'un que nous supposons être le maitre coutelier remet à chaque chef de famille un couteau pour chaque nouveau né. C'est en tout cas ce que l'on nous a expliqué, mais étant donné le nombre de couteaux qui vont être distribués (près de 40) soit cette cérémonie n'a lieu que très rarement, soit ils n'étaient pas destinés qu'aux nouveaux enfants.
A chaque fois le chef de famille est appelé et partage une boisson (qui n’a pas l’air très bonne au vu des têtes que faisaient les gens en le buvant) avec le maitre coutelier qui lui remet alors le nombre de couteaux adéquats.
Après le second repas nous n’avions plus vraiment faim : l'appétit de Lise était parti lors de la séquence avec la vache, alors que Thomas avait bien profité des premiers plats servis, d'autant que nous avions en plus le repas préparé par notre guide. Il nous restait aussi de la marche pour terminer notre journée, et nous sommes donc repartis après avoir passé 4h avec eux.
Ça a été compliqué pour notre guide de refuser, sans vexer notre hôte, de partir avec une cuisse de porc, mais vu la marche au soleil qui nous attendait ca nous a paru une sage décision.
Pendant cet après midi nous avons surtout observé, seuls notre hôte et notre guide parlaient anglais ; et joué avec les nombreux enfants qui voulaient tous poser pour se voir en photo. Nous nous sommes senti très privilégiés de partager ce moment de fête durant lequel tous les gens présents semblaient être heureux et profiter de la journée.
Nous passons la nuit chez une autre famille, dans un nouveau village un peu plus gros mais qui s'organise aussi autour de son église dans laquelle nous entendrons pour nous endormir des chants religieux, et nous reveillerons avec la messe.
Au vu de la chaleur de ces deux derniers jours notre guide nous propose de d’appeler des motos pour venir nous chercher a une rivière le lendemain, évitant ainsi une grande montée de plusieurs heures sans trop d’intérêts pour retourner à Mindat. Nous acceptons volontiers et nous retrouvons donc à passer 30min en moto sur des chemins de randonnées. Première surprise les motos s’arrêtent à chaque point d’eau pour en verser un peu dessus et ainsi raffraichir le moteur qui ne semble pas apprécier la chaleur plus que nous. Deuxième surprise : la fête de l’eau a commencé. C’est à dire que dès que nous arrivons sur une route nous croisons des enfants avec des pistolets a eau, et des ados ou adultes avec des seaux d’eau qu’ils nous jettent/versent joyeusement dessus !
Nous avons beaucoup apprécié ces 3 jours de treks, et si les paysages n'étaient pas incroyables, nous avons en revanche découvert un peuple très accueillant et intéréssant au mode de vie très loin du notre.
Une fois de retour à Mindat, nous nous sommes reposés dans notre guesthouse et mis en quête de transport pour repartir.